L'important n'est pas la chute, mais l'atterrissage • avec Pietro Maximoff

  Parfois, Leo se disait qu’il devrait prendre des vacances. Après tout, il travaillait constamment depuis son arrivée dans cette étrange ville, six mois auparavant. Il aurait dû se reposer après la guerre contre l’Empire Ottoman, mais il ne pouvait s’empêcher de s’activer. Cet endroit était incroyablement différent de tout ce qu’il connaissait, et la technologie y était visiblement plus avancée ; par conséquent, il avait dû se mettre à jour. Il s’était alors rendu compte que ses inventions étaient légèrement dépassées, mais aussi qu’il était devenu un artiste mondialement connu après sa mort -et même pas pour une oeuvre intéressante, en plus ! La Joconde était certes un beau tableau, mais c’était loin d’être son meilleur. En plus, il lui venait d’une vision qu’il avait eue lorsqu’il voyageait entre le monde des morts et celui des vivants ; ce n’était donc pas un tableau qui venait de son imaginaire. La vision avait tout de même été utile puisqu’elle lui avait permis de résoudre l’énigme de la Voûte Etoilée ; peut-être était-ce dans sa nostalgie que Leo l’avait peinte des années après.
  Mais maintenant qu’il y pensait, comment avait-il pu peindre ce tableau et avoir la vie que Wikipédia lui donnait puisqu’il se trouvait ici, à Imaginarium ? Il appréciait qu’on le considérât comme « l’un des plus grands peintres de tous les temps » ou encore « la personne la plus talentueuse dans le plus grand nombre de domaines différents ayant jamais vécu » -vraiment, ça flattait son égo- mais il ne comprenait pas comment il avait pu mourir en France sachant que cette ville magique était a priori impossible à quitter. Par contre, il appréciait moyennement que l’on critiquât sa « procrastination chronique »: être un génie était fatiguant à force -en fait non, il était juste paresseux. On lui devait de nombreuses connaissances en hydrodynamique, anatomie et autres, donc on pouvait s’estimer heureux. D’ailleurs, s’il n’avait pas mis sa procrastination de côté pour ouvrir des corps et les étudier, ça n’aurait pas été fait avant longtemps. L’inventeur ne comprenait pas pourquoi on s’attachait autant à ce qu’édictait l’Eglise, et son expérience avec le Pape et ses hommes ne l’avait fait que davantage détester cette institution. Mais bon.

  Quoiqu’il en fût, il avait vraiment l’impression d’avoir besoin de vacances parfois. Il travaillait d’arrache-pied à étudier les nouvelles inventions et tentait de les améliorer, et il passait ses jours et ses nuits dans son atelier. Il s’occupait aussi de réparer les appareils défaillants de ses voisins, mais il finissait généralement par leur fabriquer leurs propres machines. Jusque là, il avait reçu de -plutôt- bons retours. En plus, il avait pris un jeune homme comme apprenti, donc le reste de son énergie servait à lui enseigner ce qu’il savait.
  Ce jour-là, sa fatigue se fit ressentir sévèrement. Alors qu’il portait des caisses en bois pleines de matériel, ses bras cédèrent en même temps qu’il trébucha sur les pavés.  « ARGH » lâcha-t-il tandis que ses belles caisses s’écrasaient au sol dans une explosion de bois et de métal. Quel dommage, il ne restait rien de bon. Leonardo se contenta de fixer le désastre avec un regard blasé. Il était vraiment fatigué.